Valérie Renard : Le Carnet vert
Au sein du Club Femmes ici et ailleurs, nous avons la chance de compter des personnalités exceptionnelles, agissant dans des domaines très divers, en France et bien au-delà de nos frontières.
Férue de voyages et de rencontres, Valérie Renard part en 2013 pour une année sabbatique avec sa famille à bord d’un voilier. De ce périple naîtra son premier livre, Et si on partait. Les épreuves de la vie la conduisent en 2020 à se consacrer pleinement à l’écriture et à publier au mois de septembre, Le carnet vert aux éditions Maïa.
Propos recueillis par Emma Gomez, Femmes ici et ailleurs
Quel parcours de vie vous a mené à l’écriture ?
Je suis née et j’ai passé les premières années de ma vie en Allemagne, puis j’ai fait de nombreux voyages, au fil desquels j’ai beaucoup écrit. Après mes études de tourisme, j’ai travaillé pendant onze ans pour un programme d’échange européen, puis dix-huit ans en tant que directrice d’un site touristique. Aujourd’hui, ma troisième vie professionnelle démarre, autour de l’écriture. J’aime relever des défis, créer, communiquer, partager, lancer de nouveaux projets. Les retours que j’ai eus sur mon premier livre étaient assez encourageants et m’ont donné des ailes pour poursuivre l’aventure. J’accompagne également des personnes qui ont des projets d’écriture, mais qui ne savent pas comment les lancer, notamment dans le cadre de campagnes de crowdfunding. Depuis trois ans, je mène des ateliers d’écriture sur un voilier, le Bateau plume, qui reprendront à partir du mois de mai en petits groupes.

En septembre 2020, vous publiez Le carnet vert, quels sont les thèmes que vous abordez dans ce livre ?
Je suis mariée depuis trente ans et maman de deux enfants : Tom, qui a été adopté et Julie, un bébé surprise. Dans ce livre, je raconte mon parcours de maman et les étapes qui ont jalonné mon désir d’enfants, entre l’attente, l’adoption, la maternité et ses épreuves, les aventures avec notre fils, les retrouvailles avec sa famille de naissance. J’y aborde le deuil psychologique. Avant l’adoption de Tom, j’avais fait le deuil d’avoir un jour un enfant “biologique”. Alors lorsque j’ai appris que j’étais enceinte de Julie, j’ai dû faire le deuil de ce deuil, c’était très compliqué de faire marche arrière. On me disait : “Tu devrais être contente d’être enceinte, tu as toujours voulu cet enfant.” Mais l’enfant, je l’avais déjà. Beaucoup d’épreuves ont suivi ces deux naissances, réveillant instantanément un “instinct maternel” que je ne pensais pas avoir. Nos premiers pas en tant que parents n’ont pas été faciles mais je pense que les épreuves que nous avons traversées, nous ont aidés à avancer et à voir la vie différemment.
Qu’est-ce qui vous a poussé à écrire ce livre ?
Pour les dix-huit ans de notre fils, nous lui avions promis de retourner en Thaïlande, pour découvrir son pays de naissance et obtenir certaines réponses. Sur place, nous avons retrouvé ses parents de naissance, ce qui était tout à fait inattendu. J’avais toujours voulu échanger avec sa mère, car j’avais eu la chance de pouvoir adopter son enfant, alors qu’elle n’avait pas eu la chance de pouvoir le garder : j’avais l’impression de lui avoir volé son fils. La rencontre n’était pas telle que je l’imaginais à cause de la barrière de langue, de la différence culturelle, de la présence de toute la famille et du village autour de nous. J’aurais aimé lui dire tant de choses, mais je n’ai pas pu. À la fin, elle nous a remercié·e·s et son sourire a été un cadeau. Écrire ce livre était une façon de me libérer de certaines émotions, de les partager, de lui rendre un peu de ce que je lui avais pris et de rendre hommage à mon fils.

Votre sensibilité et votre besoin d’exprimer ce que vous ressentez transpirent de ce livre…
J’ai ressenti un bien fou à l’écrire, car cela libère de déposer sur le papier ce que l’on a sur le cœur. Cela permet de prendre de la distance. Écrire sur les épreuves que je traversais m’a permis de leur donner un sens. Les partager, passer le message que tout est possible, que l’espoir est toujours permis quelle que soit la situation me donne le sentiment de ne pas avoir vécu tout cela pour rien et me permet d’avancer. Ce sont la souffrance et les épreuves de la vie qui ont donné naissance à ce besoin d’écrire et de partager les épreuves que je traversais.
Avez-vous des projets pour la suite ?
Je suis en train de travailler sur mon troisième livre, qui raconte mon parcours contre le cancer du sein, que les médecins m’ont découvert en août 2020. Aujourd’hui tout va très bien, je vois cette nouvelle épreuve comme une chance, me donnant le coup de pouce dont j’avais besoin pour changer de vie. Cela me libère d’en parler. De nombreuses personnes me remercient de partager ces expériences-là. C’est en lisant le livre d’un couple qui avait complètement changé de vie que j’ai eu le courage de faire de même. Parfois les expériences des autres peuvent aider à se lancer. Ce n’est pas toujours facile, car je livre une part intime de moi, je me mets à nu. Après la lecture du Carnet vert, mon père m’a fait le plus beau des cadeaux en me disant qu’il me découvrait différemment. Mon fils ne l’a pas encore lu et il ne le lira probablement pas, ou plus tard, quand je ne serai plus là. Pour lui, c’est mon histoire et ma façon de voir les choses.
Que vous apporte le Club Femmes ici et ailleurs ?
Je suis abonnée depuis le début de l’année et je trouve que le magazine est très bien fait. J’aime beaucoup le format, la présentation, les articles qui sont dedans. C’est très chouette et l’histoire du Carnet vert est très symbolique par rapport à cette thématique, car c’est une femme en Thaïlande et une femme en Belgique. Une femme d’ici et une femme d’ailleurs. Deux mères pour un même fils.