Thumette Léon : Sourde n’est plus son identité [France]
Sur scène, elle est solaire. Magnifique danseuse et comédienne, l’artiste bretonne Thumette Léon, très active sur les réseaux sociaux, milite ardemment pour rendre visibles les sourd·e·s dans l’espace public et pour la langue des signes française.
Propos recueillis par Laëtitia Gaudin. Avec Laure Boussard, interprète en langue des signes.
Paru dans Femmes ici et ailleurs #41, janvier-février 2021
Comment êtes-vous arrivée à la danse et sur les planches ?
En 2002, j’avais douze ans, j’ai découvert la danse africaine. J’adorais ce que les vibrations du djembé provoquaient dans mon corps. Ça m’a totalement libérée. Après dix ans de pratique, je me suis dirigée vers la danse contemporaine au conservatoire de Rennes. Les collaborations se sont ensuite enchaînées.

Parlez-nous de votre travail de collecte auprès des femmes sourdes…
Olivia Le Divelec, une collègue de 10 Doigts Cie1 m’a fait prendre conscience de l’urgence à collecter la parole de la femme sourde. Jusqu’alors, il était difficile d’en trouver la trace : la langue des signes a été interdite en France pendant près de cent ans (NDRL 1880-1977) ! Avec Laurène Loctin, une amie journaliste sourde, nous avons recueilli une trentaine de témoignages à Toulouse, Rennes, Marseille et Lyon. Selon les personnes et les régions, il est plus facile d’assumer, ou pas, son identité sourde.
Ce travail a aussi eu des répercussions sur moi. Au début des entretiens, je me définissais comme sourde, puis comme femme. Au moment des répétitions de la pièce Sedruos2, restitution scénique des témoignages, sans réfléchir j’ai inversé. Inconsciemment, une évolution s’était faite. Je peux aujourd’hui dire que je suis d’abord une femme militante.