Martin Winckler : “Je rends aux femmes ce qu’elles m’ont enseigné” [France]
Il a consacré sa vie à la santé – surtout gynécologique – des femmes et à la dénonciation des violences médicales, quitte à se mettre à dos certain·e·s de ses confrères et consœurs. Médecin généraliste pendant vingt-cinq ans et auteur de romans et essais à succès, Martin Winckler se fait le fervent défenseur du choix libre et avisé des femmes pour leur santé. il vient de publier un nouveau livre, C’est mon corps.
Retrouvez Martin Winckler lors d’une Rencontre Femmes ici et ailleurs. A (re)voir ici.
Par Propos recueillis par Sandrine Boucher et Aude Stheneur
Paru dans Femmes ici et ailleurs #39, septembre-octobre 2020
Biographie express
Martin Winckler, diplômé de médecine en 1982, exerce d’abord dans un cabinet médical de campagne à Joué-Labbé, dans la Sarthe, pendant une dizaine d’années, avant d’accompagner les femmes au sein d’un centre de planification et d’IVG au Mans. En parallèle, il collabore au magazine médical Prescrire et écrit de la fiction.
En 2002, Martin Winckler tient une chronique quotidienne pour France Inter et l’année suivante, ouvre un blog consacré à la gynécologie qui reçoit aujourd’hui encore 50 000 visites par mois. Installé au Canada depuis 2008, ses romans – dont les plus grands succès sont La Maladie de Sachs en 1998, Le Chœur des femmes en 2009 et L’école des soignantes en 2019 – et ses essais, comme Les Brutes en blanc (2016), ont largement contribué à faire reconnaître les violences médicales et obstétricales en France.

Vous avez dit dans une interview que soigner et écrire étaient aussi importants pour vous. Quels liens faites-vous entre les deux ? Et entre les différentes facettes de votre œuvre écrite, guides pratiques, romans, essais ?
Je veux que les femmes se sentent mieux après une consultation ou une lecture, pas forcément parce que leurs problèmes sont résolus, mais parce qu’elles se sentent moins seules et moins désarmées, avec à leur disposition des éléments de choix plus clairs. Un guide comme C’est mon corps transmet des informations, un roman diffuse des idées et des émotions. Mais ma démarche est toujours la même : partager mes colères.
Vous venez de publier un nouveau livre, un guide pratique sur la santé des femmes. Sous votre nom, ce titre : C’est mon corps. N’est-ce pas paradoxal pour l’homme que vous êtes ?
Je ne parle pas à la place des femmes, je parle de ce que j’ai appris avec les femmes, qui revendiquent : “Fichez-moi la paix, c’est mon corps !” En écrivant ce livre, je ne fais rien d’autre que ce que je faisais comme médecin : me mettre au service des patientes, répondre à leurs interrogations dont celles, nombreuses, auxquelles je n’avais pas pensé. Je rends aux femmes ce qu’elles m’ont enseigné. Ce livre rassemble donc les réponses aux questions les plus fréquentes qui me sont posées, en ayant bien à l’esprit que je ne serai pas exhaustif et que mon point de vue est celui d’un médecin homme.
Ce ne sont que des indications, des repères, des valeurs, des réflexions, une goutte dans l’océan. Mais cette goutte peut tomber exactement au bon moment pour celle qui en a besoin, lui faire du bien et faire du bien à d’autres. Je compte furieusement sur le fait que les lectrices de ce livre vont partager les informations autour d’elles. À mes yeux, l’ouvrage exhaustif et de référence est Notre corps, nous-mêmes, qui vient d’être réédité en version française.