Marie Raymond : Prêtresse de l’art abstrait
Née dans la région niçoise, Marie Raymond (1908 – 1989) décide de devenir peintresse en visitant l’atelier d’Alexandre Stoppler dans les années 1920, à Cagnes-sur-Mer, un village de la Côte d’Azur alors très prisé des artistes.

Après des études d’art, elle commence à peindre des portraits et des paysages. Elle rencontre l’un des frères de Marcel Duchamp, le cubiste Jacques Villon, puis elle se marie en 1926 avec le peintre figuratif Friedrich Klein. Le couple s’installe à Paris, où il mène une vie de bohème. Un enfant, Yves, naît de cette union. Marie Raymond décroche une commande pour le pavillon des Alpes-Maritimes de l’Exposition universelle de 1937.
Pendant la guerre, les Klein fréquentent une petite communauté d’artistes également réfugié·e·s dans la zone Sud, dont Sonia Delaunay et Marx Ernst. Marie Raymond se lance alors dans la peinture abstraite. À la Libération, elle expose pour la première fois aux côtés d’Hans Hartung, figure clé de l’art abstrait. Leur style particulier est immédiatement repéré par les critiques. Marie Raymond rencontre alors le succès et expose au Japon, au Brésil, aux États-Unis et en Europe. Elle est la première femme à obtenir le prix Kandinsky en 1949. De 1946 à 1954, elle organise “les Lundis de Marie Raymond” dans son appartement-atelier parisien, où se pressent artistes et intellectuel·le·s qui débattent d’art contemporain.

Leur fils, Yves Klein, reçoit un enseignement artistique de ses parents, qui se séparent en 1958. Marie Raymond encourage son fils dans cette voie et lance sa carrière. Il se spécialise dans les monochromes, crée chimiquement une couleur qu’il fera breveter, l’IKB, le fameux bleu Klein, et lance le mouvement des Nouveaux Réalistes. Hantée par sa mort prématurée en 1962, Marie Raymond ne cessera de promouvoir ensuite le travail de son fils.
Elle s’initie aux grands formats et s’essaie à de nouvelles techniques comme la peinture fluorescente. Dans les années 70 et 80, elle écrit également de nombreuses critiques pour des revues d’art. Elle meurt en 1989 et est inhumée aux côtés de son fils.
Durant toute sa vie, son extraordinaire inspiration se sera traduite en un singulier cocktail de couleurs, de sensibilité exacerbée, de formes abstraites et de vitalité cosmique. ●
Laurence Dionigi
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Laurence Dionigi est une autrice, conférencière, chroniqueuse et grande voyageuse, ayant collaboré à de nombreux médias de par le monde. Depuis 2013, elle organise la manifestation, Fémin Auteures, à Antibes et anime des cafés littéraires dans la région niçoise. Avec une dizaine d’ouvrages à son actif, elle met lumière la place des femmes dans l’art avec par exemple Les grandes oubliées de l’art.