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Dossier : Chute du mur, où sont les femmes ? [Allemagne]

Le soir du 9 novembre 1989, à la stupéfaction générale, le mur de Berlin s’écroulait, mettant fin à la Guerre froide et à quatre décennies de division de l’Allemagne. Dans les récits des livres, dans les images de la foule en liesse gravées dans la mémoire collective, les femmes sont curieusement absentes d’un événement dont elles ont été aussi parties prenantes. Nous sommes allé∙e∙s à la rencontre de ces personnalités courageuses et engagées, que l’histoire officielle semble avoir oubliées.

Texte d’Annabelle Georgen
Paru dans Femmes ici et ailleurs #34, novembre-décembre 2019 

© Sueddeutsche Zeitung Photo / Alamy Stock Photo

Ces images ont fait le tour du monde : ici un groupe de Berlinois en train de disloquer un pan de béton face à des soldats est-allemands stoïques, là un jeune homme debout sur le mur, immortalisé dans une pose héroïque, en train de brandir un immense piolet, là encore des hommes massés bras dessus bras dessous face à la Porte de Brandebourg… “Où sont les femmes ?” C’est la question entêtante qu’on se pose en passant en revue les photos iconiques de la chute du mur ou en feuilletant les innombrables ouvrages et publications consacrés à l’événement.

Elles étaient là pourtant. Et elles ont été nombreuses à s’impliquer dans la révolution pacifique qui a éclos en 1989 derrière le “mur de la honte”. Elles étaient aux premiers rangs des manifestations qui ont secoué l’Allemagne de l’Est dans les mois qui ont précédé l’effondrement de la RDA (République démocratique allemande). Elles distribuaient des tracts antirégime au nez et à la barbe de la Stasi, la police secrète est-allemande. Elles organisaient des actions de protestation et des prières pour la paix dans les églises. Elles étaient impliquées au sein de mouvements citoyens et de groupes de femmes.

Femmes pour la paix

Ute Leukert est l’une d’elles. Cette retraitée de soixante-cinq ans a cofondé un groupe baptisé Femmes pour la paix, en 1984, à Leipzig, quand la Guerre froide menaçait de virer au conflit armé. “Au début des années 1980, la RDA avait voulu rendre le service militaire obligatoire pour les femmes. En réaction, un groupe basé à Berlin baptisé Femmes pour la paix avait signé une déclaration commune pour refuser de s’y soumettre”, explique Ute Leukert. Plus de 150 femmes ont alors apposé leur signature, un acte très courageux sous la dictature communiste où toute tentative d’expression d’une opinion politique était systématiquement réprimée. Sans surprise, les principales signataires de cet appel ont été arrêtées et emprisonnées pendant plusieurs semaines, parmi lesquelles l’artiste peintre Bärbel Bohley (1945-2010), grande figure de la contestation est-allemande. Ce mouvement de femmes essaima ensuite dans toute la RDA.

La première « manifestation du lundi » a lieu le 4 septembre 1989 à Leipzig. Les Est-Allemand·e·s réclament le droit de circuler librement au-delà du rideau de fer. Leur slogan principal : « Wir wollen raus ! » (Nous voulons sortir !). © Wolfgang Kumm/Photo12/Picture Alliance
L’antenne berlinoise des Femmes pour la paix (Frauen für den Frieden) avant la chute du mur à Berlin, lors d’un « atelier pour la paix » réunissant diverses initiatives citoyennes pacifistes. © Werner Fischer/Robert-Havemann-Gesellschaft
Porte de Brandebourg en 1973, le plus célèbre monument berlinois, vu depuis la partie est de la capitale allemande. Jusqu’à la chute du mur, cette porte était inaccessible : elle se trouvait au beau milieu du « no man’s land », zone hérissée de miradors et de barrières surveillée 24 heures sur 24 par l’armée est-allemande, afin d’empêcher les habitant·e·s de fuir à l’Ouest. © DPA/AFP Photo ; Bernd Gutkaes

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