Aya Chebbi : Féministe panafricaine [Tunisie]
De la révolution tunisienne à l’action diplomatique, Aya Chebbi a passé les dix dernières années à bâtir des passerelles enjambant les frontières de l’Afrique. Son rêve : reconstruire une solidarité continentale pour les droits des femmes.
Par Lena Bjurström
Paru dans Femmes ici et ailleurs #32, juillet-août 2019
2011. Partout dans le monde, médias et personnalités politiques commentent à l’envi l’onde de choc de la révolution tunisienne. “Printemps arabe”, “Révolution du jasmin” et autres termes fleuris tapent sur les nerfs d’Aya Chebbi, alors étudiante âgée de vingt-trois ans. “J’étais frustrée par toutes ces récupérations et interprétations, si loin de la réalité.” Elle décide donc de raconter l’effervescence des lendemains de la révolution sur un blog, ProudlyTunisian.

Sa parole passionnée l’emporte bien au-delà de ce qu’elle imaginait. Devenue une figure de la révolution connectée, elle se rend aux quatre coins du continent pour rencontrer et former de jeunes activistes aux outils numériques. “J’ai été frappée de voir tout ce que nous avions en commun, de la révolution tunisienne au mouvement Y’en a marre, au Sénégal”, raconte-telle.
Aya Chebbi se plonge alors dans la pensée panafricaine des années cinquante et soixante et s’interroge : “Ces mouvements n’avaient pas la technologie dont nous disposons. Pourquoi aujourd’hui ne construisons-nous pas cette solidarité alors que nous en possédons les outils ?” En 2012, elle crée un groupe Facebook informel, pour rassembler les militant·e·s rencontré·e·s au cours de ses voyages. Deux ans plus tard, le groupe devient une plateforme, l’Afrika Youth Movement, qui fédère plus de dix mille jeunes de quarante pays africains.