Tous les deux mois, nous vous invitons à (re)découvrir une date importante de l’histoire des femmes, ici ou ailleurs. Une histoire trop souvent oubliée.
Paru dans Femmes ici et ailleurs #20, juillet-août 2017

Déposée en 1894, la proposition de loi autorisant les femmes mariées à disposer de leur salaire est enfin adoptée en France le 13 juillet 1907. Cette loi est la première brèche ouverte dans le Code civil napoléonien de 1804, qui faisait des femmes d’éternelles mineures et “la propriété de l’homme”.
À l’origine de cette avancée se trouve Jeanne Schmahl, sage-femme d’origine anglaise. L’époque est celle de la première vague du féminisme. En 1893, cette républicaine et libre-penseuse fonde l’Avant-Courrière.
Le groupe se donne deux objectifs : obtenir que les femmes puissent être témoins dans les actes civils (la loi fut votée en 1897) et leur concéder un début d’autonomie financière. Un an après la création du collectif, une proposition de loi est rédigée et soutenue par des parlementaires progressistes. Pour arracher cette réforme législative, il faudra treize années “d’atermoiements parlementaires”, observe Jeanne Schmahl, qui dissout ensuite l’Avant-Courrière et rejoint le mouvement des suffragettes d’Hubertine Auclert.
La loi de 1907 sera peu ou mal appliquée : banquiers et notaires continueront à réclamer une autorisation maritale aux épouses. Une loi suivante, en 1938, fera un — petit — pas supplémentaire : elle supprimera le devoir d’obéissance de la femme envers son époux et lui accordera une capacité juridique. Les Françaises obtiendront alors, entre autres, le droit d’avoir… une carte d’identité. Dans les faits, il faudra attendre 1965 pour qu’une réforme des régimes matrimoniaux détricote véritablement le Code Napoléon. Près de soixante ans donc pour qu’une loi soit appliquée, pour que les femmes puissent travailler et ouvrir un compte bancaire à leur guise, sans avoir besoin de l’assentiment de leur conjoint. ●